Des voeux, encore des voeux et toujours des voeux mais très institutionnels et officiels ceux là...
Pour son dernier discours de rentrée solennelle, le procureur général de la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, a usé, vendredi 7 janvier, des deux figures rhétoriques qui sont le sel de la dialectique judiciaire, le réquisitoire et le plaidoyer. Dans la ligne de tir de son réquisitoire: l'ingérence outrancière du politique dans les affaires judiciaires, dont le président de la République, Nicolas Sarkozy, et son ministre de l'intérieur, Brice Hortefeux, sont les plus fervents, mais aussi inquiétants, porte-parole.
Au rendez-vous des espérances de son plaidoyer: la fin d'un système, celui du maintien programmé de la sujétion du parquet au pouvoir politique, qui vaut pourtant à la France d'être régulièrement pointée du doigt par l'Europe.
Il faut bien mesurer la portée, serait-elle symbolique, de l'événement qui vient de se dérouler. La charge que le haut magistrat de la Cour de cassation, peu réputée pour être un repaire de révoltés de l'hermine, a sonnée contre les dangers de la politisation du judiciaire – et tout particulièrement contre les dérapages du pouvoir actuel en la matière – doit en effet se lire autant comme une alerte que comme un révélateur.
L'alerte, c'est celle du deuxième plus haut magistrat français, passé notamment dans les années 1980 par le cabinet du ministre socialiste Robert Badinter, contre les entailles répétées de l'exécutif dans les fondements mêmes de notre contrat républicain, à savoir la séparation des pouvoirs.
Le révélateur, c'est celui d'une certaine révolte sourde des magistrats qui gronde dans les palais de justice de France contre le dévoiement de leur mission citoyenne et l'appauvrissement de leurs moyens, ici dans les parquets, là chez les magistrats du siège, et que la parole du procureur général de la Cour de cassation vient, d'une certaine manière, de mettre à nu.
Voici l'intégralité de son discours: